Accusations internes de manipulation du débat à la Convention citoyenne sur la fin de vie

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Le 19 février dernier, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) avait diffusé les résultats des votes de la Convention citoyenne sur la fin de vie, une publication qui laissait entendre que ses membres se prononçaient en faveur de l’euthanasie et du suicide assisté. Le 3 mars, Le Figaro a révélé le contenu d’une lettre d’une quarantaine des membres dénonçant une désinformation et s’inquiétant même d’une possible manipulation.

L’information avait fait le tour des médias, la Convention citoyenne s’était prononcée en faveur d’une aide active à mourir, sous conditions, sans que celles-ci ne soient précisées. Cette information était biaisée, selon plus d’une quarantaine de citoyens qui représentent près du quart des 184 membres de la convention.

Le CESE avait indiqué le jour même du vote, sur son site, les résultats des votes concernant 11 questions qui laissaient présager d’une issue très favorable à l’euthanasie et au suicide assisté. Les 167 citoyens présents pour le vote ont ainsi voté largement non quant à la question de savoir si le cadre d’accompagnement de la fin de vie répond aux différentes situations rencontrées, 140 disant apparemment estimer que ce n’était pas le cas. 125 d’entre eux s’étaient déclarés favorable à l’aide active à mourir, 107 pour une telle aide aux majeurs et mineurs ou encore 118 en faveur du suicide assisté « avec condition(s) ». 

Dans une lettre adressée au comité de gouvernance de la Convention citoyenne et à sa présidente, Claire Thoury, membre du CESE, la quarantaine de participants critiquent le fonctionnement de cette convention voulue par Emmanuel Macron. Le document, dont Le Figaro a publié des extraits, insiste sur le fait qu’il « s'agissait d'un vote sur les idées et non sur l'écriture précise de propositions ». 

Pas de réelle volonté en faveur du développement des soins palliatifs

D’autres indices laissent fortement supposer un désintérêt programmé pour la question des centres spécialisés. Ainsi, alors que certains participants ont demandé à auditionner l'avocat Erwan Le Morhedec, auteur de Fin de vie en République (éditions du Cerf) et favorable au renforcement des soins palliatifs, leur demande est restée lettre morte. 

Le développement des soins palliatifs ne serait-il pas une option sérieusement envisagée par le CESE et, au-delà, le pouvoir politique ? Plusieurs membres de la Convention ont vainement demandé à pouvoir effectuer une visite groupée d’un centre de soins palliatifs et ont dû s’y rendre par eux-mêmes ou par petits groupes. 

Soline souligne avec amertume que « cela a été très dur d'entendre dans les médias que les citoyens avaient tranché sur l'aide active à mourir alors que les travaux ne sont pas terminés », et dénonce une manipulation des objectifs : « On se retrouve à porter le poids de la responsabilité d'un changement de la loi mais ce n'est pas le travail qu'on nous a confié. » Elle dénonce également la confusion délibérée entre les partisans d’une évolution du cadre légal sur la fin de vie et ceux d’une ouverture à l’aide active à mourir.

Alors que 140 citoyens ont répondu par la négative à la question « Le cadre d'accompagnement de la fin de vie répond-il aux différentes situations rencontrées ? », les réponses ne pouvaient qu’être mal interprétées, explique Volcy : « Nous avons demandé que la question soit précisée, ce qui nous a été refusé : pour tout un tas de raisons, il est difficile de soutenir qu'un cadre existant constitue une réponse parfaite à toutes les situations, donc on ne pouvait que répondre non à cette question. » Ce citoyen était favorable à l’aide active à mourir, mais ne veut pas que cela soit présenté « comme une solution » et non « comme une possibilité laissée ouverte ».

D’autres citoyens favorables à l’aide active à mourir se posent des questions que ne prend pas en compte le CESE. Une participante en vient à déclarer : « Par moments, j’ai l’impression que c’est de la manipulation. »

La Convention se réunira encore tous les week-ends jusqu’au 19 mars. Elle votera alors sur ses propositions qui seront transmises au gouvernement.

Jean Sarpédon
 


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