En Inde, le combat d’un fils pour offrir à son père une sépulture chrétienne

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En Inde, l’inhumation d’un pasteur chrétien a donné lieu à un bras de fer judiciaire inédit entre une famille endeuillée, des autorités locales hostiles, et la plus haute juridiction du pays. Une affaire emblématique de la persécution croissante des chrétiens dans l’État de Chhattisgarh.

Ramesh Baghel n’aurait jamais imaginé devoir se battre trois semaines pour enterrer son père, le pasteur Subhash Baghel. Mais le décès de celui-ci, le 7 janvier dernier, a déclenché une véritable épreuve de force.

Le pasteur Subhash Baghel est décédé le 7 janvier à l'hôpital, et son fils prévoyait de l’enterrer dans le cimetière du village de Chhindwada, où les corps d’au moins une vingtaine de membres chrétiens de sa famille ont déjà été inhumés. Mais une partie des villageois s’est opposée à l’enterrement, et s’est rendue chez Ramesh Baghel pour signifier son opposition.

La police, arrivée sur les lieux, s’est rangée du côté des villageois. "C'est à ce moment-là que j'ai compris que je n'avais pas d'autre choix que de demander justice devant les tribunaux", a déclaré M. Baghel, à Morning Star News.

Le lendemain, la Haute Cour de Chhattisgarh est saisie avant de trancher trois semaines plus tard : Ramesh ne pourra pas enterrer son père dans le village. Pourtant, la juge Nagarathna avait reconnu une discrimination manifeste contre les chrétiens, violant les principes de laïcité de l’Inde. La décision finale – un compromis entre deux juges – a ordonné l’inhumation dans un cimetière chrétien éloigné de 40 kilomètres, tout en imposant à l’État de Chhattisgarh de créer, sous deux mois, des espaces d’inhumation pour les chrétiens. À ce jour, aucune action concrète n’a été entreprise.

C’est donc en pleine nuit, escorté par la police, que Ramesh a été contraint d’enterrer son père à 40 kilomètres de chez lui. Les autorités ont précipité les funérailles : "Ils auraient jeté son corps dans la terre si nous n’avions pas insisté pour un minimum de dignité", témoigne un pasteur présent.

Cette affaire met en lumière une persécution plus large : attaques contre les églises, expulsions de familles chrétiennes, violences physiques, comme celle ayant entraîné la fausse couche d’une femme enceinte en janvier.

Pourtant, le christianisme dans cette région indienne ne date pas d’hier. Depuis l’implantation de la première église à Jagdalpur en 1933, une communauté chrétienne s’est développée. Mais aujourd’hui, cette minorité, qui représente près de 10 % de la population de certaines villes, est marginalisée au nom d’une identité religieuse imposée.

Le contexte politique n’est pas étranger à cette montée de l’intolérance. Depuis l’arrivée au pouvoir du BJP, parti nationaliste hindou, les atteintes à la liberté religieuse se sont multipliées. L’ONG Portes Ouvertes place l’Inde au 11e rang des pays où les chrétiens sont le plus persécutés – contre le 31e en 2013.

Germain Gratien

Crédit image : Morning Star News

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