Entretien avec Miki Hardy

Le pasteur Miki Hardy est le fondateur du réseau apostolique international d’églises, CTMI (Church Team Ministries International). Profondément attaché à la diversité et à la complémentarité des ministères selon Éphésiens 4, accompagné de son épouse Audrey et de plusieurs autres ministères, il accompagne de nombreux pasteurs et évangélistes. Il œuvre ainsi au salut et à la sanctification du plus grand nombre au sein de son église à l’île Maurice, mais aussi en Afrique, en Europe et aux États-Unis. Miki a accepté de répondre aux questions de la rédaction d’Info Chrétienne, et nous le remercions pour son ouverture, le partage sincère des difficultés rencontrées tout au long de son parcours, et son désir de communiquer le message de la croix à travers le monde entier.

• Peux-tu nous raconter ta rencontre avec Jésus ?

J’ai grandi dans une famille catholique, très religieuse. En 1977, des réunions « charismatiques » ont été organisées au Couvent de Lorette, à Curepipe, la ville où j’habitais, et j’ai eu l’occasion d’y assister. Mes yeux se sont ouverts concernant beaucoup de choses que je croyais jusqu’alors, et je me suis rendu compte qu’elles ne trouvaient pas leur source dans les Ecritures. J’ai eu beaucoup de joie à découvrir la Parole de Dieu, et j’ai finalement compris que j’étais un pécheur et que c’était la raison pour laquelle Jésus était venu mourir pour moi. J’ai répondu à un appel, je me suis repenti, brisé devant le Seigneur, réalisant son amour pour moi, et ce fut le miracle de la nouvelle naissance. C’était en 1977.

• Quel a été le déclic qui a marqué le début de ton ministère ?

C’était plus fort que tout autre chose dans mon cœurTrès peu de temps après ma rencontre avec Jésus, j’ai ressenti que Dieu m’appelait pour Le servir et cela devenait de plus en plus clair pour moi. En 1982, alors que nous terminions notre année d’étude à l’école biblique à Durban, en Afrique du Sud, ma femme et moi avons reçu plusieurs prophéties de la part d’hommes de Dieu qui ne nous connaissaient pas et qui confirmaient l’appel que je ressentais depuis longtemps déjà. Et là, c’est devenu très clair que le Seigneur m’appelait dans le ministère à plein temps, pour le servir avec mon épouse à l’île Maurice, notre pays natal. Ce n’était pas simple car mes parents avaient consenti beaucoup de sacrifices pour m’envoyer faire des études supérieures – j’étais ingénieur civil de profession – et il y avait un prix à payer pour tout abandonner et répondre à cet appel. Mais c’était plus fort que tout autre chose dans mon cœur, et ça ne nous a pas pris longtemps pour prendre la décision de tout quitter en Afrique du Sud, où nous avions acheté une maison, étions établis dans l’église à Durban et avions organisé notre vie. Toutefois, nous ne serions jamais partis simplement de nous-mêmes. Nous connaissions suffisamment les Ecritures pour savoir que nous devions être envoyés. Le Pasteur Fred Roberts a reconnu cet appel dans notre vie et a donc prié pour nous envoyer dans le service. Nous sommes repartis à l’île Maurice avec nos deux filles qui alors avaient 7 ans et 3 ans, et cela fait maintenant 35 ans que nous servons le Seigneur ici. Le Seigneur a aussi ouvert des portes dans plusieurs parties du monde, spécialement en Afrique, où nous travaillons avec des centaines de pasteurs.

• La vie est parfois soumise aux épreuves. Serais-tu d’accord d’en partager une avec nous, et surtout de nous faire découvrir de quelle manière tu l’as surmontée avec la grâce de Dieu ?

En 1996, ma femme et moi avons fait l’objet d’attaques virulentes des médias de l’île, qui étaient très hostiles à l’église. Nous étions leur cible principale. Ce fut pour nous une expérience très dure mais aussi très enrichissante. De fausses accusations concernant ma famille, concernant l’église, etc. ont été étalées dans les journaux de façon continue pendant des semaines. C’était comme une pression constante sur nous, mais toute l’église nous soutenait dans la prière et la communion fraternelle. C’était une grande épreuve pour notre foi, à une époque où le message de la croix devenait de plus en plus réel dans ma vie. Nous avons choisi de ne pas nous défendre, de ne pas nous justifier, mais plutôt de pardonner à tous nos détracteurs. Ce n’était pas évident, mais nous avions compris que cela faisait partie de la croix que nous devions porter, et que nous étions appelés à nous identifier aux souffrances de Jésus.

Il n’y a pas de raccourcis, de moyens d’éviter les épreuves, car c’est la manière que Dieu utilise pour former ses serviteursBeaucoup de personnes nous ont encouragés à entamer des poursuites judiciaires, mais nous savions que c’était notre route et que le Seigneur honorerait cette décision. Nous avons vraiment expérimenté la grâce du Seigneur et la victoire a été grande. Nous sommes sortis de cette épreuve avec une plus grande maturité. Même si cette expérience a été très douloureuse, elle a été très bénéfique, et l’église aussi en est sortie plus forte. En tant que serviteurs de Dieu, il est important que nous puissions et sachions être éprouvés, de différentes manières, afin de transmettre la vie de Jésus aux autres. Paul a dit : « Ce n’est plus moi qui vit, c’est Christ qui vit en moi. » (Galates 2 v. 20). Il n’y a pas de raccourcis, de moyens d’éviter les épreuves, car c’est la manière que Dieu utilise pour former ses serviteurs.

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• Quel est le projet ou la réalisation dont tu es le plus fier ?

En 2001, j’ai ressenti le besoin de partager avec d’autres pasteurs la révélation que j’avais reçue du Seigneur concernant le message de la croix. Avec ma femme et quelques pasteurs d’églises partenaires, j’ai fondé CTMI (Church Team Ministries International). Depuis, CTMI travaille avec des centaines de serviteurs de Dieu, dans plusieurs pays du monde, principalement en Afrique, avec pour résultat qu’un grand nombre de pasteurs ont connu un changement drastique dans leur propre vie, dans leur foyer et dans leurs églises. Il va sans dire qu’en conséquence, ce sont des milliers de chrétiens qui en bénéficient.

• Quelle est la plus grande leçon que tu aies apprise au travers de ton ministère ?

Il y a toujours une grande victoire au bout du compteJ’ai appris, pendant toutes ces années passées à servir le Seigneur, que tout n’est pas toujours facile. La vie chrétienne comprend des moments de joie mais aussi des persécutions, des épreuves, des moments de tristesse, des moments durs que nous ne pouvons éviter. Mais tout ceci n’est jamais pour rien, car il y a toujours une grande victoire au bout du compte. Du reste, Paul dit clairement que « toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein » (Romains 8 v. 28). Les voies du Seigneur ne sont pas nos voies.

• Et si c’était à refaire ! Que changerais-tu ?

Rien, car aujourd’hui en regardant en arrière, je ne regrette pas les épreuves par lesquelles je suis passé et je réalise qu’il a fallu que je prenne ce chemin pour que Christ soit formé en moi.

• Quelle est la personne qui a eu un rôle majeur tout au long de ton parcours ?

Ma femme Audrey qui a toujours été un grand soutien pour moi, et qui n’a jamais peur de me remettre en question. Elle m’a soutenu dans toutes les situations difficiles que j’ai traversées, que ce soit quand j’ai eu à faire face à un gros problème de santé ou à des moments de persécutions, et elle n’a jamais hésité à me parler des points dans ma vie où j’avais besoin de changer et de grandir.

• As-tu des modèles, des mentors, des personnes qui te poussent à aller de l’avant et à devenir meilleur ?

J’ai suivi de près le parcours de frères et sœurs avec lesquels je travaille depuis de nombreuses années, et ils sont un témoignage de la puissance du message de la croix qui a changé leur vie, leur couple, leur ministère. Leurs vies aujourd’hui représentent un défi et un encouragement constant car je connais leurs chemins, leur consécration, leur amour pour l’œuvre de Dieu.

• Quel est le personnage biblique qui est une source d’inspiration pour toi ? Et pourquoi ?

Les épîtres de Paul m’ont montré la voieDans les moments où je cherchais désespérément une direction du Seigneur pour ma vie et pour l’église, les épîtres de Paul m’ont montré la voie. J’ai beaucoup appris de cet homme de Dieu dont les écrits sont finalement avant tout un récit de sa vie, de ce par quoi il est passé, de la manière dont il s’est identifié aux souffrances de Jésus. Ce qui m’a aussi beaucoup interpellé, c’est de voir comment il défendait avec passion l’évangile et le message qu’il avait reçu de Jésus, et comment il travaillait avec toute une équipe. Il est un modèle de l’appel de Dieu et de l’exercice du ministère qui a un impact dans la vie des autres. Il a été pour moi une source d’encouragement extraordinaire. Dans ses épîtres, nous pouvons découvrir le modèle de la construction de l’église avec les différents ministères, la relation entre ces ministères et surtout la révélation que ces ministères avaient du message de Jésus pour le transmettre à l’église.

• Quel conseil pourrais-tu donner à celles et ceux qui souhaitent se lancer dans la même voie que toi ?

On ne peut pas changer ce que Jésus a prévu pour son ÉgliseIl y a beaucoup trop de personnes aujourd’hui qui s’engagent dans un ministère, d’une part sans même être vraiment appelées du Seigneur, et d’autre part, sans avoir une idée de ce que le ministère représente réellement. Quand l’idée de servir le Seigneur a commencé à prendre naissance dans mon cœur, à cette époque je pensais que ça consistait principalement à prêcher l’évangile, donc à préparer des messages, connaître ma Bible, prier, jeûner, etc. Mais je n’avais jamais réalisé que cela demanderait ma vie – en d’autres mots, que je serais appelé à « perdre » ma vie ! C’est pourquoi, quand quelqu’un aujourd’hui me parle de son désir de « servir le Seigneur », je l’encourage toujours à considérer d’abord le coût avant de s’aventurer dans le ministère, et de s’assurer que c’est bien Jésus qui l’appelle. Nous voyons aujourd’hui trop de gens qui se lancent dans le ministère sans être envoyés et qui s’octroient des titres. C’est néfaste pour l’Église, le corps de Christ. On les voit exercer dans l’église une autorité qu’ils n’ont pas reçue du Seigneur, qui vient de la chair, et cela au détriment des croyants qui en souffrent. On ne peut pas changer ce que Jésus a prévu pour son Église : elle doit être construite selon le plan de Dieu, selon le cœur du Seigneur.

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• Comment perçois-tu tes prochaines années dans le ministère ? Quel est le ou quels sont les projets qui te tiennent à cœur ?

Je voudrais voir le message de la croix de Jésus se répandre dans le monde entierJe voudrais voir le message de la croix de Jésus se répandre dans le monde entier, et beaucoup d’églises représenter Jésus avec honneur. Je prie que le Seigneur puisse réunir les serviteurs de Dieu et les conduise à se rendre compte que beaucoup de choses ont remplacé le véritable évangile, qui doit retrouver sa place dans l’église. En d’autres mots, que les serviteurs de Dieu puissent remettre de l’ordre dans l’église.

• L’actualité est souvent troublée et triste. Chrétiens persécutés, société à la dérive, catastrophes naturelles, changements éthiques majeurs… Quelle est ta position face à ces événements ? Es-tu plutôt engagé, veilleur attentif, lanceur d’alerte, intercesseur ?

Je suis bien sûr concerné par le sort de mes frères et sœurs qui sont persécutés pour leur foi en Jésus. D’ailleurs, en tant qu’organisation, nous soutenons très souvent ceux qui exercent un ministère en faveur des chrétiens persécutés. Sinon, pour le reste, je ne suis pas engagé à évaluer les évènements que vous mentionnez, mais je suis conscient du temps dans lequel nous vivons. Je profite de toute occasion pour alerter les chrétiens sur les dangers de l’influence du monde et de la multiplication des fausses doctrines dans l’église. Il faudrait qu’il y ait plus de sentinelles pour sonner de la trompette afin de mettre en garde les chrétiens contre les abus, les tromperies, les hérésies au sein même de l’église. Fort heureusement, Jésus est sur le trône et c’est Lui qui bâtit son église, et nous avons la foi qu’Il le fait bien et dans son temps.

Miki, merci pour ta disponibilité et ton coeur de voir le Royaume de Dieu s’étendre avec puissance. Que le Seigneur vous accompagne Audrey et toi, et qu’il continue de vous accorder une pleine bénédiction dans votre ministère.

La rédaction