
Jeudi 25 septembre, l’émission Envoyé spécial a consacré un documentaire aux évangéliques Français et à leur influence croissante. L'église MLK de Créteil dénonce une "approche manifestement orientée".
"Évangélique : un succès pas si angélique ?" Le ton est donné. Dans un documentaire d’Envoyé spécial, diffusé sur France 2 le 25 septembre, les journalistes se sont intéressés au milieu évangélique en France.
L’enquête s’ouvre à l’église MLK de Créteil, dirigée par le pasteur Yvan Carluer. La journaliste décrit un culte conçu comme un véritable spectacle, utilisant des termes tels que "show", "mise en scène" ou encore "expert de la punchline".
Envoyé spécial suit ensuite Martine, une fidèle qui parcourt près de quatre heures de route tous les quinze jours pour rejoindre cette église. Après avoir partagé son témoignage de conversion, elle explique, face caméra, les différents changements survenus dans sa vie : désormais elle affirme renoncer aux films de sorcellerie, à la sexualité hors mariage, et décide de s’habiller "sans trop découvrir" son corps.
Mais rapidement, le documentaire se focalise sur les positions du milieu évangélique concernant deux thèmes sensibles : l’avortement et l’homosexualité. Martine explique que selon sa foi, l’un comme l’autre, ne sont pas admis par Dieu. Des idées que la journaliste a qualifié d’"ultra-conservatrices".
S’ensuivent les propos tenus par l’influenceur évangélique David Antoine. Face à la journaliste affirmant que l’orientation sexuelle n’est pas un choix, il explique que "le Christ libère" et que "Dieu a fait l’homme pour la femme". Selon lui, la foi peut transformer un individu homosexuel pour "le faire redevenir à ce qu’il était à l’origine : hétérosexuel".
Enfin, l’équipe d’Envoyé spécial s’est rendue à l’église MLK, cette fois en caméra cachée, pour un entretien pastoral. L'objectif étant de vérifier si, en tête-à-tête, les pasteurs encouragent les fidèles à renoncer à leur homosexualité. Sur place, la personne qui préside l'entretien conseille à la journaliste de "vivre dans l’abstinence".
Ces propos sont ensuite soumis au pasteur Yvan Carluer. Celui-ci évoque une perspective biblique :
"Le christianisme considère qu’il existe des pratiques qui ne sont pas conformes aux textes. La norme, c’est l’hétérosexualité."
Il ajoute que la position de son église repose sur une démarche spirituelle :
"Laisse le Saint-Esprit t’éclairer sur ta conduite et il va t’amener à la transformation."
Le documentaire se conclut par une prise de position du média en évoquant des accusations de "thérapies de conversion", d’"emprise mentale", “d’isolement" ou encore de "pression financière".
Dérives
Le documentaire donne aussi la parole à d’anciens fidèles ayant quitté le mouvement. Laurie raconte qu’elle pensait être "possédée" lorsqu’elle traversait des crises d’angoisse. Elle fréquentait alors une église à Dijon.
Les journalistes rencontrent également sa sœur et son beau-frère, ce dernier étant un ancien pasteur. Avec le recul, il exprime ses regrets : il estime qu’il n’aurait pas dû prêcher que "Jésus accomplit des miracles incroyables" et reconnaît avoir participé, à l’époque, à des pratiques assimilées à des thérapies de conversion.
Thomas, qui a souhaité garder l’anonymat, témoigne qu'en tant qu'homosexuel son pasteur avait prié pour lui. Une démarche qui l’a plongé dans une profonde détresse. Il explique être devenu malheureux et angoissé à la suite de cette expérience.
Réactions du milieu évangélique Français
L’une des premières à avoir réagi est l’église MLK. Dans un communiqué publié à 20h, soit avant le début du documentaire, elle dénonce une "approche manifestement orientée" et se réserve le droit "d’exiger l’exercice d’un droit de réponse".
"Compte tenu de l’approche manifestement orientée de ce synopsis — évoquant notamment des 'méthodes d’emprise', un 'marketing pour propager leur vision' ou encore des 'croyances qui poussent certains fidèles à perdre pied avec la réalité' — et du refus notifié par France Télévisions ce jeudi 25 septembre à 18h45 d’organiser un débat contradictoire, démocratique et transparent dans la foulée de la diffusion, nous réservons notre opinion quant au contenu de ce reportage. [...] Nous nous réservons donc le droit de publier une mise au point, d’exiger l’exercice d’un droit de réponse et de saisir les instances compétentes."
David Antoine a également réagi en publiant une vidéo sur Instagram en évoquant "un torchon". Il a indiqué que des centaines de croyants lui ont envoyé un message pour l’encourager.
Le Conseil National des Évangéliques de France évoque "un reportage à charge et aux méthodes discutables". Par cette diffusion, c’est 1.2 millions de protestants évangéliques qui ont été "stigmatisés".
"Ce reportage est une attaque manifeste envers le protestantisme évangélique et la foi chrétienne dans son ensemble. Assimiler l’évangélisme à un mouvement 'ultraconservateur', homophobe, et le présenter essentiellement à travers une mise en scène orientée qui revient à stigmatiser les 1,2 millions de protestants évangéliques de France2 et plus largement tous les chrétiens français."
De son côté, la Fédération Protestante de France a exprimé "sa vive préoccupation" face à des méthodes journalistiques "contestables".
"La Fédération protestante de France déplore que ce reportage ait choisi de présenter les Églises évangéliques à travers le prisme réducteur des excès de quelques-uns, sans nuance ni véritable expertise. Cette approche tronquée occulte la richesse et la vitalité d’une Église évangélique comme MLK, qui apporte beaucoup à ses membres, à la société et au protestantisme dans son ensemble."
"Allez encourager tous les ministères qui ont été évoqués, écrivez au pasteur, à l'église, à l’influenceur David Antoine, à Eric et Rachel Dufour : il faut les soutenir, les encourager et leur dire que vous êtes derrières eux !" a lancé Pyou, fondateur de la plateforme onestcrea dans un live tourné juste après le documentaire.
InfoChrétienne apporte son soutien à l’église MLK et aux chrétiens évangéliques de France. D’autres articles sur le sujet seront publiés dans les prochains jours.
Mélanie Boukorras