Fin de vie : les évangéliques alertent les parlementaires sur les dérives d’un projet de loi qui "menace la dignité des plus vulnérables"

Fin de vie les évangéliques alertent les parlementaires sur les dérives d’un projet de loi qui "menace la dignité des plus vulnérables"

Alors que l’Assemblée nationale poursuit l’examen du projet de loi sur l’aide active à mourir, le Conseil national des évangéliques de France (CNEF) a publié jeudi un communiqué accompagné d’une lettre adressée au parlementaires. Invoquant la "dignité inestimable" de toute vie humaine, les protestants évangéliques dénoncent un texte qu’ils jugent porteur de "perspectives incontrôlables" et appellent à renforcer les soins palliatifs.

Le débat sur la fin de vie entre dans une phase décisive à l’Assemblée nationale. Mercredi, les députés ont adopté les modalités encadrant la demande d’une aide à mourir, dans le cadre de l’examen du projet de loi très débattu. Le lendemain, le Conseil national des évangéliques de France (CNEF) a publié un communiqué de presse accompagné d’une lettre adressée à des parlementaires. Une action menée "en parallèle", précise le CNEF, du travail de ses services juridiques et pastoraux, qui ont également transmis des propositions d’évolution de la loi à certains élus.

"Alors que le gouvernement français envisage de légaliser l’aide active à mourir, c’est-à-dire le suicide assisté et l’euthanasie, nous, protestants évangéliques, affirmons que cette voie menace la dignité des plus vulnérables", écrivent les protestants évangéliques dans cette lettre.

Une "pente délétère" illustrée par les expériences étrangères

Le CNEF alerte sur les risques de dérives, en s’appuyant sur l’observation des législations en vigueur dans d’autres pays : "L’observation des législations des pays étrangers (Belgique, Pays-Bas, Canada, notamment) qui ont ouvert l’option de l’aide active à mourir nous ôte l’illusion de penser pouvoir fixer de manière stable les conditions d’accès à l’euthanasie : cette ouverture est une pente délétère". Il rappelle également qu’en 2013, le Comité consultatif national d’éthique mettait déjà en garde contre cette dynamique.

À travers l’exemple de l’élargissement progressif de l’euthanasie à des personnes vulnérables dans ces pays (mineurs, personnes handicapées, souffrant de dépression, etc.), le CNEF met en garde contre une législation qui pourrait, en France aussi, évoluer au détriment des plus fragiles.

Une procédure jugée dangereusement lacunaire

Sur le plan procédural, la missive critique l’absence de collégialité obligatoire, de traçabilité, ou d’examen psychiatrique préalable. Le CNEF s’étonne que "la demande de mort peut être en effet simplement adressée à un médecin oralement, sans témoin ni trace d’un consentement écrit", conférant à un seul praticien une décision "irréversible".

Les délais proposés – 15 jours pour la réponse médicale, 48 heures pour la réitération – sont jugés "expéditifs". Le CNEF cite à ce propos une tribune du Figaro qui soulignait que "même pour une opération esthétique le délai obligatoire est plus long !", rappelant que le désir de mourir est "fluctuant" et peut évoluer lorsqu’un patient est "entouré d’une humanité soignante et aimante".

La lettre plaide pour un soutien accru aux soins palliatifs, dénonçant une logique où la mort deviendrait un soin. "Comment les mains qui soignent pourraient être les mêmes qui inoculent la mort ?", interroge le texte, en référence au serment d’Hippocrate et à l’article L4127-38 du code de la santé publique.

Plus encore, le CNEF met en garde contre les dérives économiques et idéologiques : "Réduire ces individus à l’idée qu’ils ‘pèsent’ ou ‘coûtent’ revient à nier leur dignité intrinsèque", écrit-il, s’inquiétant d’une "posture cynique" dans certains discours autour de l’aide active à mourir.

Une dignité fondée sur la foi

Au cœur de sa démarche, le Conseil national des évangéliques de France défend une conception chrétienne de la dignité humaine, fondée sur la conviction que toute vie, quelles que soient ses limites, mérite protection et accompagnement. "La dignité d’une société devrait se mesurer à sa capacité à protéger et entourer les plus faibles plutôt qu’à précipiter leur disparition" souligne ainsi l'organisation qui formule l’espoir que la France reste fidèle à cet idéal d’humanité et de solidarité.

Dans cet esprit, les évangéliques affirment que le projet de loi actuel "n’est pas digne de notre devoir d’humanité". Ils appellent de leurs vœux une législation véritablement "protectrice", et insistent sur la nécessité de renforcer les soins palliatifs plutôt que de légaliser une aide à mourir. "Chaque être humain, créé à l'image de Dieu, possède une dignité inestimable, quelles que soient ses limites ou faiblesses", rappellent-ils en conclusion, exhortant les parlementaires à "agir pour une société humaine qui soigne, accompagne, protège et honore la vie".

Une déclaration qui s’inscrit dans la continuité du positionnement déjà exprimé en janvier 2023, où le CNEF rappelait déjà que "l’Évangile nous appelle à aimer et prendre soin particulièrement des plus fragiles dans notre société" et invoquait le commandement biblique : "Tu ne commettras pas de meurtre".

Camille Westphal Perrier


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