Plus de 6 000 chrétiens vivent dans la ville indonésienne de Cilegon, mais aucune église n’a reçu d'autorisation pour s'implanter. L’organisation International Christian Concern raconte le quotidien d’Abina, une septuagénaire qui parcourt chaque dimanche 20km pour se rendre dans l'église la plus proche.
Depuis plus de trente ans, la ville indonésienne de Cilegon, dans la province de Banten sur l'île de Java, ne dispose pas d'églises car la population sur place y est opposée. Le maire et son adjoint ont même signé une pétition contre la construction d’une église dans la ville.
L'organisation International Christian Concern (ICC) partage le quotidien d'Abina, une chrétienne indonésienne de 76 ans qui doit ainsi parcourir vingt kilomètres pour se rendre dans une église. Tous les dimanches, elle se réveille à quatre heures du matin. Après s’être apprêtée, elle prend un moto-taxi au départ de Cilegon, à la route provinciale puis prend un bus jusqu’à la ville voisine de Serang. Elle arrive ensuite à l'église protestante Huria Kristen Batak qui officie dès 6h du matin.
Un quotidien difficile pour la septuagénaire qui lui coûte de l’argent, mais également du temps et de l’énergie.
Cette ville est pourtant composée de 6 979 chrétiens. Selon ICC, ce territoire constitue "un symbole de l’échec de la promotion du pluralisme religieux en Indonésie". Selon les données officielles du gouvernement, il existe pourtant sur son territoire 492 mosquées
Le quotidien d'Abina est le même que celui de nombreux chrétiens. C'est le cas notamment de la mère de famille prénomée Rini Penas Meyrita Simanjuntak, de son mari et de leurs trois enfants. Eux aussi, doivent se rendre à Serang pour participer au culte depuis leur installation dans la ville de Cilegon il y a quatorze ans.
Au début, ils se rendaient à Serang en bus, pour un aller-retour coûtant cinq mille roupies par personne. Puis, ils ont dû opter pour la moto, plus coûteuse. Lors des offices, les chrétiens organisent des collectes pour soutenir financièrement ceux qui viennent de loin, mais ces contributions restent parfois insuffisantes.
Dans le pays, "la situation des chrétiens se dégrade en même temps que la société se radicalise, devenant plus conservatrice dans sa pratique de l’islam et moins tolérante envers les minorités religieuses", estime l’ONG Portes Ouvertes.
"Dans certaines régions, les églises non traditionnelles ont des difficultés à obtenir la permission de construire une église (cela peut aussi toucher certaines églises catholiques) et même à se réunir en églises de maison. Souvent les chrétiens attendent des décennies pour finalement pouvoir construire une église."
Mélanie Boukorras