Présence Protestante (France 2) a diffusé le 9 novembre un nouvel épisode d'Ecriture.s intitulé "Le jardin d'Anne Le Maître". La théologienne Marion Muller-Colard a rencontré Anne Le Maître, chez elle, pour son livre "Le Jardin nu". Puis ensemble, elles sont allées à la rencontre de Frère Olivier, dans le parc de l’Abbaye de Citeaux.
Souvenez-vous. Immergez-vous. C’était il y a peu, c’était encore le printemps. - Sur un lopin de terre, au carrefour des saisons, Anne était dans son jardin, à Dijon. Celle qui se définit comme "Géographe, aquarelliste, prof et un peu jardinière", recevait une lettre : Marion Muller-Collard lui proposait la rencontrer pour échanger autour de son livre, Le Jardin nu.
"Jésus lui dit : Ne me touche pas ; car je ne suis pas encore monté vers mon Père. Mais va trouver mes frères, et dis-leur que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu." Évangile de Jean, chapitre 20.
Derrière les tuyas, sur des chaises en rotin, l’auteure et l’éditrice (qui est aussi auteure) parlent jardin, fauvette et foi. Le petit carré d’herbe de la banlieue pavillonnaire s’ouvre alors sous le cerisier comme une fenêtre sur le monde. Nous voilà quelque 1992 ans plus tôt, en ce qui ne s’appelle pas encore "l’an 33".
Nous sommes dans un autre jardin. Marie de Magdala s’est rendue là où Jésus a été enseveli. La pierre est roulée, le tombeau vide. Marie court chercher Simon Pierre et "l’autre disciple". Ce dernier arrive le premier, mais il n’entre pas dans le tombeau. Pierre, qui le suit, si. "L’autre" le rejoint, voit et croit.
Puis les deux s’en retournent chez eux. Restée seule (en tout cas, c’est ce qu’elle pense), Marie pleure… Comme une madeleine. Alors même qu’elle pleure, elle voit un homme, qui se trouve être là. "Femme, pourquoi pleures-tu ?" lui demande-t-il. Pensant que c’est le jardinier, elle lui répond :
"Si c’est toi qui as emporté le corps de Jésus, dis-moi où tu l’as mis, et j’irai le prendre."
Nous connaissons la suite…
Ce sera une révélation. L’histoire ne dit pas ce que Simon Pierre et "l’autre disciple" ont fait. Mais visiblement, ils n’ont pas fait grand-chose. Ou plus précisément, ce qu’ils ont fait n’a pas eu de répercussions, dans ce récit du moins. En fait, peut-être même que tout aurait pu s’arrêter là.
Mais Marie est restée. Elle avait apporté des huiles parfumées qui n’allaient plus servir à rien. Elle a pleuré. Où était Jésus ? Où était son corps ?
Puis il aura fallu un jardinier présumé. Un gars, d’aspect un peu banal sans doute, sinon, Marie ne se serait pas méprise… Ça m’a travaillé, cette histoire de jardinier, la houe sur l’épaule… Du moins, c’est ainsi que Fra Angelico a représenté Jésus et qu’il a investi notre imaginaire.
Ne sommes-nous pas tous un peu jardinier et voyageur sur cette terre ?
Le jardinier de l’histoire, c’est celui qui va rencontrer Dieu. Les mains peut-être encore sales de son travail sur terre, il n’est en tout cas pas encore pur. Mais par son travail, il a déjà vu Dieu. Oui, voilà, c’est ça qui me travaillait : tout jardinier qui se respecte a vu Dieu. Dans le printemps qui passe, une cerise que l’on goûte, une herbe vaine que l’on arrache à la houe ou à la main, dans une fauvette qui ne possède rien, mais chante, dans la graine ou l’oignon de novembre que l’on enfouit avec l’assurance qu’au printemps, il/elle portera fleur ou fruit. En toute saison, jardinez, jardinez mes amis. Et vous verrez, vous verrez Dieu.
Et Marie, alors ? "Elle est là, nous dit Anne, fleur rose parmi les fleurs blanches, celle qui, dans quelques instants deviendra la première des apôtres […] se tient perdue dans le regard d’amour [de Jésus], la joue humide encore de larmes. Et sur le pré tout autour d’elle, sous ce regard qui s’éternise, des taches rouges". Dans les pieds de ce jardinier encore sale, impur, mais qui a vu Dieu, qui connaît Dieu, deux trous.
Une émission préparée et présentée par Marion Muller-Colard et réalisée par Denis Cérantola.
Christophe Zimmerlin, pour Présence Protestante.
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