Le roi Charles III est devenu jeudi 23 octobre le premier monarque britannique à prier publiquement avec un pape depuis le schisme anglican au XVIe siècle, à l'occasion d'une célébration présidée par Léon XIV dans la chapelle Sixtine.
Cette cérémonie, qui a mêlé des traditions catholiques et anglicanes, marque un nouveau rapprochement entre les deux Églises, d'une ampleur inédite depuis la naissance de l'anglicanisme en 1534, au moment de la rupture du roi Henri VIII avec Rome.
Sous les fresques de Michel-Ange, Léon XIV et l'archevêque de York Stephen Cottrell ont présidé la célébration en présence de prélats catholiques et anglicans, de responsables politiques et de diplomates, tandis que la chorale de la chapelle Sixtine accompagnait celle de la chapelle Saint-Georges de Windsor.
Temps fort de la visite d'État du roi au Vatican, cette prière d'une trentaine de minutes était axée sur la protection de la nature, signe de la convergence entre les deux Églises sur les questions environnementales, dix ans après l'encyclique Laudato Si' du pape François sur l'écologie intégrale.
Quelques minutes plus tôt, le monarque de 76 ans, qui assume le rôle de gouverneur suprême de l'Église - anglicane - d'Angleterre, a été reçu en audience privée par le pape, leur première rencontre depuis que l'"Américain a succédé en mai à François à la tête de l'Église catholique.
Accompagné de son épouse Camilla, les cheveux couverts d'une mantille noire, Charles s'est adressé en anglais au souverain pontife dans une ambiance cordiale et a échangé des cadeaux avec lui, selon des images diffusées par le Vatican.
Différends théologiques
Cette visite intervient dans un contexte délicat pour le monarque britannique, dont le frère Andrew fait l'objet de nouvelles révélations accablantes dans l'affaire du pédocriminel Jeffrey Epstein.
L'anglicanisme est né d'une scission avec l'Église catholique provoquée par le roi d'Angleterre Henri VIII à la suite du refus du pape d'annuler son mariage avec Catherine d'Aragon.
Cette prière "est un évènement historique", explique à l'AFP William Gibson, professeur d'histoire ecclésiastique à l'Oxford Brookes university. Il rappelle que le souverain britannique est tenu par la loi d'être protestant.
"De 1536 à 1914, il n'y avait pas de relations diplomatiques officielles entre le Royaume-Uni et le Saint-Siège", dit-il. Londres n'a ouvert une ambassade au Vatican qu'en 1982.
Et ce n'est qu'en 2013 que la loi a permis aux membres de la famille royale épousant des catholiques de conserver leur place dans l'ordre de succession, insiste William Gibson.
Récent, ce rapprochement est "important dans la mesure où l'anglicanisme est né en réaction à l'Église catholique et donc dans l'opposition", rappelle à l'AFP le frère Hyacinthe Destivelle, un prêtre dominicain français membre du dicastère (ministère) pour la promotion de l'unité des chrétiens.
Contrairement à l'Église catholique romaine, l'Église anglicane ordonne des femmes et permet aux prêtres de se marier. Pour la première fois de son histoire, elle vient de nommer à sa tête une femme, Sarah Mullally, une mère de famille de 63 ans, provoquant de fortes tensions internes.
Cette dernière prendra ses fonctions officielles en janvier 2026 et n'était pas présente jeudi.
"Confrère royal"
Jeudi après-midi, Charles et Camilla ont assisté à un autre service religieux œcuménique à Saint-Paul-hors-les-murs, l'une des quatre basiliques majeures de Rome.
A cette occasion, le roi a été officiellement reçu le titre de "confrère royal" et un siège spécial a été créé pour lui, qui restera dans la basilique et pourra être utilisé à l'avenir par ses successeurs sur le trône britannique.
Le couple royal avait rencontré en privé le pape François le 9 avril dernier au Vatican, 12 jours avant sa mort. Charles III a été représenté par son fils William aux funérailles du jésuite argentin, puis par son frère le prince Edward à la messe d'intronisation de Léon XIV le 18 mai.
En 1961, la mère de Charles, Elizabeth II, avait été le premier monarque britannique à se rendre au Vatican depuis le schisme.
L'Église d'Angleterre, en perte de vitesse, compte une vingtaine de millions de fidèles baptisés mais évalue à un peu moins d'un million les pratiquants réguliers, selon des statistiques portant sur l'année 2022.
La Rédaction avec (AFP)