Le Secours Catholique alerte sur l'aggravation de la pauvreté en France "qui touche en premier les femmes"
Dans son rapport annuel sur l'état de la pauvreté en France, publié ce mardi, le Secours Catholique pointe "une nette aggravation de la pauvreté en 2022" qui touche en premier les femmes.
Chaque année depuis bientôt trente ans, le Secours Catholique publie une photographie de la pauvreté dans l'hexagone. Le rappot "Etat de la pauvreté 2023" publié ce mardi 14 novembre, révèle que la pauvreté s'aggrave dans notre pays. "Sans surprise, dans un contexte de forte inflation sur l’alimentation et l’énergie, nos statistiques montrent une nette aggravation de la pauvreté en 2022", écrit l'organisation.
Les chiffres sont en effet alarmants : le revenu médian des personnes accueillies par l'association s'établit à 538 euros par mois, soit moins de la moitié du seuil de pauvreté estimé à 1.211 euros. Cela représente un budget journalier de 18 euros pour subvenir à l'ensemble des besoins d'un ménage. La situation est d'autant plus préoccupante que l'inflation, qui affecte particulièrement les prix des produits alimentaires et de l'énergie, entraîne un recul de 7,6% des revenus.
Les femmes, premières victimes de la pauvreté
Le rapport révèle que "les premières victimes de la pauvreté sont les femmes, et surtout les femmes avec enfants".
Le Secours Catholique fait en effet état de chiffres témoignant "d’une inégalité entre hommes et femmes qui ne faiblit pas". L'organisation explique que les femmes "sont plus exposées à la pauvreté" car elles sont moins bien payées que les hommes mais également parce que "neuf fois sur dix, elles qui assument la charge des enfants quand les couples se séparent".
"Celles qui travaillent sont moins bien payées, plus souvent à temps partiel subi, et leurs carrières hachées se traduisent par de faibles retraites. D’autres voudraient bien travailler, mais leur situation administrative les en empêche. Si les femmes font davantage appel au Secours Catholique, c’est aussi parce que, neuf fois sur dix, ce sont elles qui assument la charge des enfants quand les couples se séparent. Elles encore qui portent majoritairement la charge mentale de tous les jours, des courses, des conduites, des repas, des papiers, des soins... le tout avec un budget impossible à boucler, qui transforme le quotidien en source d’angoisse permanente."
Autre évolution notable, la population rencontrée par l'organisation est "plus jeune en moyenne que la population française" mais depuis dix ans, elle a "tendance à vieillir". Ainsi la part des plus de 60 ans rencontrés par l'association est passée de 6ù à 13% en dix ans.
Aussi, de plus en plus de jeunes adultes se trouvent en situation de grande fragilité : "85 % des 15-25 ans rencontrés par l’association vivent dans un ménage sous le seuil d’extrême pauvreté".
Le Secours Catholique révèle également que pour la première fois depuis dix ans, "la proportion d’étrangers diminue parmi les personnes accueillies (49,5 % en 2022, soit près de 1 point en moins que l’année précédente)". Le rapport souligne néanmoins que les "conditions de vie des étrangers continuent à se dégrader et plus de la moitié d’entre eux sont sans ressources".
"bien commun bafoué"
Dans son "regard spirituel", inséré dans le dossier, l'économiste et théologienne Elena Lasida dénonce "un bien commun bafoué par le non-accès aux biens et aux droits, mais surtout un commun meurtri où l’humain, le politique et l’écologique sont amputés des relations vitales".
Un commun "où le spirituel est essoufflé, vidé, desséché" regrette la théologienne qui estime toutefois que ce rapport "montre également la puissance de la relation gratuite et conviviale, la force de l’interdépendance existentielle". Elle ajoute que c'est cette relation qui "rend le commun spirituel". Elena Lasida décrit surtout un rapport qui rend visibles des femmes devenues invisibles à cause de la pauvreté.
En conclusion de leur éditorial qui ouvre le document, la présidente de l'association Véronique Devise et la Déléguée générale, Adélaïde Bertrand, invitent à l'action contre "cette épreuve qui nous concerne tous".
"Et si, face à cette épreuve qui nous concerne tous, nous décidions collectivement de nous tenir aux côtés des personnes en galère, et avec elles, de tourner enfin le dos à la pauvreté ?"
Camille Westphal Perrier
