« Le sort de ces 5 personnes sera votre destin » : Ils filment l’exécution de 5 humanitaires pour avertir les chrétiens

« Ceci est un message adressé à tous ceux qui sont utilisés par les infidèles pour convertir les musulmans au christianisme. [...] Si vous ne tenez pas compte de notre avertissement, le sort de ces cinq personnes sera votre destin. »
Mercredi 22 juillet, une vidéo a été publiée sur Youtube. Elle montre l’exécution de cinq travailleurs humanitaires au Nigéria par des militants de l’État Islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP). Il s’agirait d’une menace faite à « tous ceux qui sont utilisés par des infidèles pour convertir des musulmans au christianisme ».
Dans la vidéo de 35 secondes, on voit cinq hommes à genoux, les yeux bandés d’un tissu rouge, menacés par cinq autres hommes armés de fusils AK-47. Selon Morning Star News, trois d’entre eux seraient chrétiens, deux autres musulmans.
L’un des bourreaux dit en haoussa :
« Ceci est un message adressé à tous ceux qui sont utilisés par les infidèles pour convertir les musulmans au christianisme. Nous voulons que vous compreniez que ceux d’entre vous qui sont utilisés pour convertir les musulmans au christianisme ne sont utilisés qu’à des fins égoïstes. Et c’est la raison pour laquelle chaque fois que nous vous capturons, ils ne se soucient pas de vous sauver ou de travailler pour obtenir votre libération auprès de nous ; et c’est parce qu’ils n’ont pas besoin de vous ou n’apportent pas de valeur à votre vie ; retournez à Allah en devenant musulmans, nous continuerons à bloquer toutes les routes que vous empruntez. Si vous ne tenez pas compte de notre avertissement, le sort de ces cinq personnes sera votre destin. »
À la fin de ce message, les cinq hommes sont abattus.
Ishaku Yakubu travaillait pour Action contre la Faim, Luka Filibus pour International Rescue Committee et Joseph Prince pour une société de sécurité privée. Tous trois étaient chrétiens et avaient été enlevés en juin dernier.
Le président nigérian Muhammadu Buhari a adressé ses condoléances aux familles des victimes ainsi qu’aux organisations, qu’il remercie pour « leur dévouement et leur service continus aux victimes de Boko Haram dans le nord-est du Nigéria ». Il affirme agir pour que « tout vestige restant de Boko Haram soit complètement anéanti du nord-est du Nigéria ».
Janez Lenarčič, commissaire européen à la gestion des crises, dit, dans des propos repris par le média nigérian Daily Trust, se joindre « à la communauté humanitaire pour condamner fermement le récent meurtre de travailleurs humanitaires qui ont été enlevés en juin le long de la route Monguno-Maiduguri dans le nord-est du Nigéria ».
« C’est une période extrêmement difficile pour la communauté humanitaire au Nigéria. Des points de contrôle informels des véhicules et des embuscades le long des routes principales de l’État de Borno ont fait des centaines de civils enlevés, blessés ou tués depuis le début de l’année. L’insécurité dans le nord-est du Nigéria, touché par le conflit, affecte gravement la population civile et entrave la capacité de fournir une aide humanitaire aux personnes qui ont besoin d’un soutien urgent. Les travailleurs humanitaires ont une mission - celle de sauver des vies. À un moment où les besoins humanitaires sont à leur plus haut dans le nord-est du Nigeria, aggravés par la pandémie de coronavirus, les travailleurs humanitaires continuent d’aider de manière désintéressée les personnes dans le besoin pour lesquelles cette aide est leur seule bouée de sauvetage. Sauver la vie d’autrui ne devrait pas coûter des vies. »
Antonio Guterres, secrétaire général des Nations Unies, « condamne fermement » ces meurtres. Il exprime « ses plus sincères condoléances aux familles des victimes ainsi qu’au gouvernement et au peuple nigérians » et appelle « les autorités nigérianes à ne ménager aucun effort pour identifier et traduire rapidement en justice les auteurs de ces meurtres ».
Edward Kallon est coordonnateur humanitaire au Nigéria. Il se dit « profondément choqué et horrifié par le meurtre horrible de certains de nos collègues et partenaires par des groupes armés non étatiques dans l’État de Borno ».
« Ce sont des humanitaires dévoués qui ont consacré leur vie à aider les personnes et les communautés vulnérables dans une zone fortement touchée par la violence. Nos collègues et partenaires ont été enlevés alors qu’ils voyageaient sur une route principale reliant la ville nordique de Monguno à Maiduguri, la capitale de l’État de Borno. Leur sécurité et la sécurisation de leur libération ont été notre priorité absolue depuis leur capture le mois dernier. Je condamne fermement toute violence visant les travailleurs humanitaires et les civils qu’ils aident. »
Il se dit « préoccupé par le nombre de points de contrôle illégaux pour les véhicules mis en place par des groupes armés non étatiques le long des principales routes d’approvisionnement ».
« Ces points de contrôle perturbent la fourniture d’une assistance vitale et augmentent les risques pour les civils d’être enlevés, tués ou blessés, les travailleurs humanitaires étant de plus en plus pointés du doigt. [...] À un moment où les besoins humanitaires ont atteint des niveaux sans précédent, il est inacceptable que ceux qui tentent d’aider soient attaqués et tués. Cet incident ne dissuadera pas la communauté internationale de fournir une aide à des millions de Nigérians qui ont désespérément besoin d’assistance dans le nord-est. La communauté humanitaire est solidaire des habitants des États de Borno, d’Adamawa et de Yobe qui ont souffert de longues années de conflit et ont désormais besoin d’une protection contre un virus mortel. »
M.C.
Crédit Image : Morning Star News