Les chrétiens iraniens face à une parodie de justice

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Alors que des Iraniennes manifestent pour leurs droits depuis la mort de Mahsa Amini, le 16 septembre dernier, après son arrestation par la police des mœurs, les autorités ont relâché deux chrétiens en deux jours. Ils étaient incarcérés à la tristement célèbre prison d’Evin où de nombreux manifestants contre le voile ont été enfermés. En dépit de ces libérations anticipées, la situation des chrétiens iraniens est très difficile dans ce pays théocratique dont le pouvoir réel est entre les mains du clergé chiite.

La situation des chrétiens iraniens a surtout été médiatisée en 2010 quand la justice a condamné à mort par pendaison le pasteur Youcef Nadarkhani pour évangélisation et apostasie. Nadarkhani avait renoncé à l’islam, ce qui est passible de la peine capitale sous le régime des mollahs.

Les chancelleries occidentales, dont la France, avaient fait pression sur l’Iran pour que la vie du pasteur soit épargnée. Relâché en septembre 2012, le pasteur a été arrêté à deux reprises, la seconde fois en 2016 avec son épouse et trois autres chrétiens, avant d’être à nouveau libéré en même temps qu’elle.

Cette situation très médiatisée est celle que rencontrent les chrétiens des communautés non historiques en Iran que sont l’Église de l’Orient ou l’Église orthodoxe. Contrairement aux fidèles des églises traditionnelles, les chrétiens qui fréquentent les organisations religieuses récentes sont d’origine musulmane et ont donc commis le crime officiel d’apostasie. C’est ce qui a conduit à la détention à Evin des deux chrétiens libérés en octobre, Fariba Dalir et Naser Navard-Goltapeh. Ils ont été graciés par le Guide suprême, Ali Khamanei, après respectivement 200 jours et cinq années de réclusion.

Il est difficile de savoir s’il s’agit là de libérations destinées aux regards de l’Occident.

Selon l’ONG Article 18, il y a au moins dix autres chrétiens emprisonnés à la prison d’Evin et huit dans d’autres prisons en Iran ou à l’étranger, les chiffres réels étant probablement plus élevés, concède l’association.

Violences de la force publique et accusations médiatiques d’espionnage ou de viol

Les conditions d’arrestation et de détention sont particulièrement éprouvantes pour les chrétiens qui doivent faire face aux violences de leurs gardiens et, en amont, des policiers.

En avril 2021, Fatemeh (Mary) Mohammadi avait été condamnée à 30 jours de prison et 10 coups de fouet. Convertie au christianisme, la jeune femme de 21 ans avait officiellement été condamnée pour avoir participé à des manifestations contre le gouvernement. Elle assure ne pas y avoir pris part, mais dit qu’elle et sa famille ont été torturées avant son incarcération. « Aussi, même si j’avais été acquitté, cela n’aurait pas été un véritable acquittement ! », dénonce-t-elle, tout en ayant fait le choix de ne pas interjeter appel.

Ce qui s’apparente à une parodie de justice est courant en matière de persécution pénale des chrétiens. Youcef Nadarhani avait été accusé dans les médias d’extorsion, de viol et d’espionnage au profit d’Israël alors que son dossier judiciaire ne mentionnait que son apostasie et ses activités missionnaires. Tandis que le pasteur Farshid Fathi, avait été condamné en 2012 à six ans de prison pour actions contre la sécurité nationale, intelligence avec l’ennemi et propagande religieuse.

Les autorités peuvent également arrêter des chrétiens sous des prétextes de dissidence théologique afin de diviser les croyants. Après la libération de Nadarkhani en septembre 2012, elles ont arrêté des dizaines de chrétiens en moins de deux mois dans le sud du pays, à Shiraz et Carvaz et ont présenté leurs doctrines comme hérétiques. Les chrétiens ont notamment été décrits comme étant unitariens, c’est-à-dire ne croyant pas en la Trinité, le pouvoir espérait ainsi que les ONG comme Portes ouvertes ne les considère pas comme des chrétiens persécutés.

Jean Sarpédon

Crédit image : Shutterstock/ Alexandros Michailidis

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