Les commissions de réparation dans l’Eglise catholique au défi de briser le « plafond de verre »

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Quelque 1.550 victimes de violences sexuelles dans l’Eglise catholique se sont adressées aux deux commissions de réparation depuis un an, un nombre peu élevé qui interpelle leurs responsables, mis au défi de briser ce « plafond de verre ».

Jeudi, la Commission reconnaissance et réparation (CRR), qui accompagne les victimes de violences sexuelles dans des congrégations catholiques, a annoncé que « 450 personnes étaient reconnues et accompagnées », par ses 25 commissaires, lors de la présentation de sa première année de fonctionnement, devant des victimes et des journalistes.

Cette structure a été créée fin 2021 après le rapport choc de la commission de Jean-Marc Sauvé qui a révélé l’ampleur de la pédocriminalité dans l’Eglise catholique depuis 1950.

Elle a pour objectif d’enregistrer les demandes de réparations, financières ou non, de victimes d’agresseurs au sein d’instituts religieux ou de congrégations (victimes de frères, soeurs, moines, moniales, etc ...), puis de proposer une médiation entre les deux parties.

« Mon interrogation principale porte sur le petit nombre de dossiers soumis à la CRR, comparé au potentiel » de victimes qui ont été évaluées dans le rapport Sauvé, a indiqué à l’AFP son président, Antoine Garapon.

« Nous ne parvenons pas à toucher » des victimes « en dehors des cercles en lien avec l’Eglise ou en lien avec la Ciase » (la commission Sauvé, ndlr), a renchéri Véronique Margron, la présidente de la Corref (représentant les congrégations religieuses), appelant à « dépasser ce plafond de verre ».

L’un des défis » pour l’année 2023 sera « d’aller chercher des victimes », a ainsi souligné Antoine Garapon, « via des appels à témoignages », ou « via la presse ».

Dans un communiqué distinct, jeudi également, une autre commission née elle aussi après le rapport Sauvé, l’Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr), a présenté son dernier bilan.

Cette structure qui s’adresse aux victimes de prêtres ou laïcs dans les diocèses, établissements ou mouvements de jeunesse catholiques, a affirmé avoir reçu, fin novembre 1.102 demandes de réparation et accompagner 260 personnes.

Un nombre qui « interpelle » même si Jean-Marc Sauvé le trouve « cohérent »

Ce nombre « m’interpelle et à un moment donné, il faudra aller chercher les victimes », a souligné sa présidente, Marie Derain de Vaucresson, auprès de l’AFP.

Cela doit passer « par davantage de communication, en se déplaçant, et en mobilisant les réseaux d’aide aux victimes », a-t-elle dit.

Plusieurs victimes ayant pris la parole ont souligné le coût psychique, pour elles, d’entreprendre de telles démarches. Et le peu de communication sur l’existence des commissions de réparation. « Il faut se battre. C’est à la victime d’être reconnue », a témoigné François Blondelle, victime, de 10 à 12 ans, des frères maristes de l’Ecole Saint-Nicolas à Lille.

Une autre victime qui avait déposé son histoire dans des cellules d’écoute de plusieurs diocèses, a raconté avoir d’abord pensé que son dossier serait transmis automatiquement vers une des deux commissions, ce qui n’est pas le cas. Elle a finalement fait la démarche, a été entendue et enfin « reconnue » par la CRR, ce jeudi.

Interrogé par l’AFP, Jean-Marc Sauvé a estimé que le nombre de dossiers reçus par les deux commissions était au contraire « très cohérent avec celui des personnes qui se sont adressées à la Ciase (2.750 environ) dans le cadre de l’appel à témoignages ».

« Beaucoup de personnes ayant parlé à la Ciase ne souhaitaient pas forcément avoir une reconnaissance personnelle de leur souffrance (ils l’avaient obtenue de la Ciase) et moins encore une réparation financière », a-t-il ajouté.

Sa commission avait réalisé plusieurs travaux: elle avait d’abord lancé un appel à témoignages (par téléphone, internet ou courrier), auquel avaient répondu 2.750 personnes.

Et elle avait réalisé une enquête qui avait estimé à environ 330.000 le nombre de victimes de prêtres, diacres, religieux ou personnes en lien avec l’Eglise (enseignants, surveillants...) depuis 70 ans, agressées lorsqu’elles étaient mineures.

La Rédaction (avec AFP)

Crédit image : Shutterstock/ John_Silver

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