Philippines : La vice-présidente mène le combat contre le Président qui prône l’assassinat

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C’est une guerre ouverte qui a débuté aux Philippines, au sommet de l’Etat, entre le Président, Rodrigo Duterte, et la vice-présidente, Leni Robredo, qui a décidé de mener les combats contre ce dernier. Duterte s’est engagé dans une dérive autoritaire qui se traduit notamment par l’incitation à assassiner les drogués et les vendeurs de stupéfiants au mépris de l’État de droit.

Si les méthodes du chef de l’État étaient jusque là contestées, une telle opposition n’avait pas encore gagné le cabinet présidentiel. Leni Robredo a démissionné dimanche de son poste de ministre du Logement et n’est désormais plus que vice-présidente. L’élue, qui parle d’un complot pour la chasser de sa place de numéro deux de l’exécutif, appelle à résister : « Ce n’est pas le moment d’avoir peur. C’est le moment d’avoir des convictions et du courage. »

Mme Robredo reproche au Président d’avoir réhabilité l’ancien dictateur Ferdinand Marcos en l’enterrant avec les honneurs militaires, le 18 novembre, vingt-sept ans après sa mort. Comme le rappelait, en septembre 2012, le journal philippin Inquirer, pour que le peuple n’oublie pas, Marcos fit passer la dette extérieure de 1 à 28 milliards de dollars entre 1965 et 1986, réduisant le pays à une profonde pauvreté, et ses détournements des prêts contractés lui rapportèrent une somme estimée à environ 5 milliards.

Duterte, l’admirateur du dictateur Marcos

Dans le quotidien Philstar, le professeur Elfren Cruz, enseignant à l’Université de La Salle-Manille, estimait en septembre 2014 que, à l’instar du Mémorial de Yad Vashem, commémorant la Shoah, les Philippins avaient besoin d’un « Musée de la loi martiale de Marcos ». L’ancien dictateur est soupçonné d’avoir fait abattre l’opposant Benigno Aquino, accusations jamais prouvées, mais qui font de cet enterrement en héros un symbole de la dérive dictatoriale d’un Duterte qui préconise le meurtre expéditif. Par la loi martiale, Marcos réduisit considérablement la criminalité, mais aussi l’opposition, et l’hommage qui lui a été rendu peut se lire en parallèle de la politique autoritaire de Cruz. Ce sont aussi les méthodes de lutte contre le crime que dénonce la vice-présidente.

Rodrigo Duterte exhorte ses concitoyens à assassiner des drogués, dans un pays où la consommation de stupéfiants fait des ravages, et, depuis l’investiture du Président, le 30 juin dernier, des milliers de personnes ont été sommairement abattues chez elles ou dans la rue. Le 30 septembre, le Président à même déclaré devant les caméras qu’il désirait, comme Hitler l’avait fait avec Juifs, supprimer 3 millions de drogués et de vendeurs de stupéfiants. Un couple de meurtriers d’État a même accordé un entretien au média australien SBS dans lequel il affirme être membre d’un groupe qui a assassiné le quart des 2 800 personnes tuées jusque vers le 20 octobre. Le journal Inquirer essaie de tenir une liste quotidienne de ceux des assassinats qu’il peut répertorier avec, si possible, l’identité des personnes tuées. Dans sa lutte contre la drogue, Duterte souhaite même emprisonner les enfants impliqués ayant au moins 9 ans, et prétend être soutenu par Donald Trump.

La vice-présidente qui reproche sa brutalité au chef de l’État n’a pas été élue en tant que colistière. Aux Philippines, le Président et le vice-président sont élus séparément. Duterte soutenait la candidature du fils de l’ancien dictateur Marcos. Les pouvoirs du vice-président ne sont pas que symboliques, il a des fonctions de contrôle administratif ou veille à l’exécution des lois.

Hans-Søren Dag


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