Portes des églises et « portes du dialogue » sont fermées par les autorités en Algérie

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L’ordonnance de 2006 fixe les règles d’exercices des cultes autre que musulman. Elle est en cause dans la fermeture des églises d’Algérie.

C’est encore une fois grâce aux réseaux sociaux que l’attention de la communauté internationale s’est posée sur la difficile situation des chrétiens en Algérie. Chacun tente désormais d’apporter sa pierre à l’édifice et d’agir, par la prière ou par des actions, afin de s’opposer à la démultiplication de fermetures d’églises.

Dans une première vidéo postée sur les réseaux sociaux, on voyait des pasteurs et responsables d’églises se mobiliser lors d’un sit-in devant le wali de Bejaia. Chacun représentait son église et dénonçait les fermetures abusives. Elle avait été suivie d’un communiqué de l’Église Protestante d’Algérie (EPA), qui souhaitait informer « l’opinion publique » et réclamait « la levée des scellés sur ses lieux de culte, l’arrêt des intimidations contre ses communautés et ses membres, l’abrogation de la loi liberticide de 2006, qui ne constitue, ni plus ni moins, qu’un outil de persécution entre les mains des autorités, dirigé contre les chrétiens algériens ».

« L’EPA informe l’opinion publique qu’elle a épuisé toutes les voies administratives pour faire valoir ses droits, mais en vain. Les portes du dialogue lui ont été, malheureusement, fermées par les autorités. l’EPA déplore particulièrement le refus incompréhensible et injustifié du wali de Bejaia de lui accorder une audience pour évoquer la question de la fermeture de ses lieux de culte. »

C’est dans une deuxième vidéo que ces menaces de fermetures sont devenues concrètes pour la communauté internationale. Diffusée le 16 octobre par International Christian Concern, on y voit les forces de l’ordre déloger les chrétiens de leur église de Tizi-Ouzou. Le média précisait alors que suite à la fermeture des deux plus grandes églises du pays, 1500 chrétiens perdaient ainsi leurs lieux de cultes.

Les autorités algériennes ont pris la décision de fermer ces lieux de culte pour motif d’ « exercice du culte sans autorisation ». L’article 42 de la constitution algérienne prévoit la liberté de culte. Mais l’ordonnance du 28 février 2006 fixe les conditions et règles d’exercice des cultes autres que musulmans. L’exercice du culte doit être autorisé par les autorités. Le prosélytisme à l’égard des musulmans est interdit, de même que la collecte de dons sans autorisation. Chaque prédicateur doit être « désigné, agréé ou autorisé par l’autorité religieuse de sa confession, compétente, dûment agréée sur le territoire national et par les autorités algériennes compétentes ». Les contrevenants sont passibles de plusieurs peines, allant de la confiscation du matériel, à l’interdiction d’exercer un culte ou une activité religieuse, mais aussi au paiement d’une amende ou à des peines d’emprisonnement allant jusqu’à 5 ans.

De son côté, le président de l’Église Protestante d’Algérie, Salaheddine Chalah, déplore, dans une interview accordée à Info Chrétienne, un manque d’informations sur les procédures d’autorisation, ainsi qu’une réalité complexe puisque chaque gouverneur peut « décider à sa manière ».

« On ne nous dit pas dans cette ordonnance comment nous pouvons constituer une association, quels documents nous devons fournir, et à qui nous devons nous adresser. Chaque wali, c’est-à-dire chaque gouverneur de la région, décide à sa manière, selon son appréciation du dossier. Et c’est ça le problème. On voit aujourd’hui les décisions des trois walis, le wali de Bejaia, le wali d’Oran, le wali de Tizi-Ouzou. Ils ont pris des décisions radicales pour gérer ce dossier des églises. »

En juillet 2018 déjà, le Comité des droits de l’Homme des Nations Unies se disait « préoccupé » par ces « fermetures d’églises ou institutions évangéliques ».

« Le Comité demeure préoccupé par les rapports faisant état de fermeture d’églises ou institutions évangéliques [...] L’État partie devrait : éliminer toute disposition législative qui viole la liberté de pensée, de conscience et de religion ; s’abstenir d’entraver le culte de personnes n’observant pas la religion officielle notamment par le biais de destructions et fermetures d’établissements ou refus d’octrois d’enregistrement de mouvements religieux non motivés par des exigences de nécessité et proportionnalité; et garantir à tous, y compris aux personnes athées et en situation d’apostasie de leur foi musulmane, le plein exercice de leur liberté de pensée, conscience et religion. »

En France, plusieurs réactions ont fait suite à ces temps de persécution. Un sit-in sera organisé le jeudi 24 octobre devant l’ambassade d’Algérie à Paris, et une pétition pour dire non à la fermeture des églises a déjà réuni plusieurs dizaines de milliers de signatures.

M.C.

Pour en savoir plus : 

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