Tribune : L’Artsakh, terre chrétienne arménienne millénaire, vient d’être dérobée par la dictature d’Azerbaïdjan

REDIFFUSION

Pascal Portoukalian est un chrétien Français d’origine arménienne, installé à Yerevan (Arménie) depuis un an.

C’est fait. Après 9 mois d’un blocus inhumain, l’Azerbaïdjan criminel du dictateur Ilham Aliyev est entré dans la phase finale de l’épuration ethnique de l’Artsakh (Haut-Karabagh).

Après avoir privé ses 120.000 habitants de ressources alimentaires, énergétiques et médicales, l’armée azerbaïdjanaise, soutenue par la Turquie et armée par Israël, a bombardé le 19 septembre une population à bout de forces et de vivres.

En 48 heures, la quasi-totalité des positions militaires arméniennes ont été prises, et la signature de la reddition a été arrachée à ce peuple qui vit sur ces terres depuis l’Antiquité.

La dictature Aliyev ne recule devant aucun élément de langage susceptible de mobiliser ses troupes et sa population. Le blocus entamé en décembre 2022 avait été initié sous la bannière de la lutte contre les dégâts écologiques opérés par les Arméniens. L’offensive disproportionnée du 19 septembre 2023 est présentée comme une lutte anti-terroriste. Les attaques et exactions qui ont émaillé la vie de la population civile et militaire ces dernières années sont annoncées comme des réponses aux provocations arméniennes.

Et en toile de fond, un roman national inventé selon lequel les Arméniens auraient volé ces terres à l’Azerbaïdjan.

Azerbaïdjan qui a été fondé en 1918, face à une Arménie vieille de 3.000 ans.

En ce moment même, des femmes et jeunes filles sont violées, des personnes âgées violentées, et des hommes tués, parce qu’ils ont le malheur de vivre sur leurs terres ancestrales. Pour combien de jours, combien d’heures encore…

L’Arménie va recueillir une grande partie de ces réfugiés. Mais cela ne se verra pas. Il n’y  aura pas de camp de réfugiés, pas de SDF mendiant leur pain dans les rues, car tous ou presque seront relogés dans leurs familles, chez leurs amis, qui leur feront une place. Les grands médias n’auront guère d’éléments visuels à se mettre sous la dent et ne couvriront pas plus le désastre qu’ils ne l’ont fait depuis tous ces mois et années.

L’Azerbaïdjan, elle, ne perdra pas de temps. Comme elle l’a déjà fait sur la partie des terres d’Arstakh qu’elle a conquis en 2020, comme elle l’avait fait précédemment sur les terres du Nakhitchevan que Staline lui donnait cent ans plus tôt, elle emploiera le même mode opératoire : détruire toute trace d’une présence arménienne sur les lieux. Faire disparaître les chapelles, les cimetières, les monuments. Et dans le meilleur des cas, transformer les bâtiments plus imposants ou plus emblématiques, et en réécrire l’histoire.

Adieu à vous, toutes ces constructions qui ont su témoigner de la foi et de la présence de la première nation chrétienne du monde sur ces terres qui furent bénies. Pardon de n’avoir pas su vous protéger davantage. Le monde avait les yeux trop occupés ailleurs. Il avait besoin de se chauffer pour l’hiver au gaz azéri. Vous êtes toujours au mauvais endroit, au mauvais moment. Désolé pour vous.

Vous tombez aujourd’hui entre des mains infâmes qui vous saliront jusqu’à vous effacer.

Mais tout comme l’identité et la foi arméniennes ont su survivre aux dominations perse, russe, arabe, mongole, turque, ottomane ; tout comme le peuple arménien a su se relever du génocide de 1915, la population arménienne d’Artsakh se souvient et redit ces mots du poète Hovhannes Chiraz (1914-1984) :

"Nous étions en paix comme nos montagnes,
Vous êtes venus comme des vents fous.
Nous avons fait front comme nos montagnes,
Vous avez hurlé comme les vents fous.
Éternels nous sommes comme nos montagnes,
Et vous passerez comme des vents fous."

Pascal Portoukalian


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