
« Les hommes sont maintenus en détention pour leur protection, car certaines personnes de la communauté musulmane veulent créer un problème religieux local. Une enquête est en cours sur les deux crimes répertoriés et il ne serait pas prudent pour ces hommes chrétiens de rester chez eux. S’ils tentent de le faire, ils seront tués par des membres en colère de la communauté. »
C’est suite à une banale histoire de voisinage que la famille Masih a subi, le 15 mai, la colère d’une foule de 40 hommes et enfants musulmans, dans un petit village près de Lahore. Aujourd’hui, 5 hommes chrétiens sont sous la garde de la police par mesure de protection et les femmes se retrouvent seules avec leurs enfants, dans la crainte.
Toute la famille était dans la maison, quand un jeune musulman, Syed Bashir Joi, s’est placé devant pour téléphoner. Comme il hurlait et tenait des propos grossiers, Naveed, le fils aîné, est sorti pour lui demander de s’éloigner pour passer son coup de fil. Mais Syed s’est senti offensé par ces propos :
« Toi, sale chura (nettoyeur sale, ndlr), tu as osé me parler, à moi qui suis musulman, et m’as souillé, attends de voir ce que je vais te faire. »
À la fin de sa journée de travail, Naveed s’est rendu vers 16 heures au poste de police pour faire état de son agression. Trois heures plus tard, les chrétiens du quartier ont entendu l’appel fait par la mosquée voisine :
« Ces Esai (terme musulman pour les chrétiens) ont blasphémé en prononçant des paroles répréhensibles contre l’islam. Tous ceux qui aiment l’islam doivent se rassembler et forcer ces créatures démoniaques à quitter ce village. »
Shukantilla, la mère de Naveed, témoigne auprès de British Pakistani Christian Association (BPCA) :
« C’était un moment horrible pour toute ma famille et d’autres chrétiens. Nous nous sommes sentis totalement impuissants. Dans notre panique, nous avons commencé à nous préparer à fuir nos maisons et à nous éloigner du village, mais nous devions tous ralentir. Nous n’avons pas tardé à entendre les musulmans se rassembler devant notre maison, même les enfants. La foule violente a encerclé notre maison et tous avaient des armes, y compris des armes à feu - des balles tirées en l’air, des bâtons, des haches, des poteaux et des outils agricoles. Même les petits enfants avaient des armes , nous craignions pour notre vie. La foule a commencé à crier devant notre maison et a demandé à notre famille de sortir de notre maison et de recevoir une rétribution divine pour notre péché. »
Wilson Chowdry est le président de la BPCA. Il a mis en ligne une vidéo de l’attaque :
Les femmes ont tenté de protéger les hommes de la famille mais elles ont été menacées d’enlèvement et de viol. Ce sont d’autres femmes musulmanes qui ont pris leur défense et les ont aidé à fuir. La foule criait :
« Quittez cette zone ou nous allons vous brûler vifs ainsi que vos maisons pour nettoyer notre région de votre souillure. »
D’autres chrétiens sont intervenus. Ils ont également été battus, mais grâce à leur intervention, la foule est repartie. La famille a pu se réfugier chez un avocat musulman modéré, Sardar Dawood Aslam Dogar. Dehors, la foule lui réclamait les chrétiens mais il a résisté et a contacté la police. Les cinq chrétiens qui ont été battus sont désormais sous leur protection. Il s’agit de Naveed, don père Farzand, son frère Hameed, ainsi que deux autres chrétiens, Sultan et Gulfam.
Dans la famille Masih, les hommes pourvoient au besoin du ménage en travaillant comme maçon. Maintenus sous la garde de la police, ils ne peuvent pas aller travailler, et laissent leur famille sans ressource. Certains commerçants musulmans ne les autorisent même plus à faire leurs courses chez eux. Les enfants ne vont pas à l’école par peur d’être kidnappés. Mehwish Bhattii, de BPCA, témoigne :
« La police locale de la police d’Arifwala a confirmé qu’aucune accusation de blasphème n’avait été faite, ce qui est réconfortant pour les familles chrétiennes. Toutefois, nous appelons les gens à prier pour que cette situation s’améliore car les familles chrétiennes n’envoient pas leurs enfants à l’école de peur d’être kidnappés ou attaqués ou pire encore d’être tués. De nombreux commerçants musulmans de la région n’autorisent pas les familles chrétiennes à faire leurs courses dans un acte de haine odieux. Certaines familles ont lancé un appel à l’aide désespéré alors qu’elles doivent se passer de nourriture certains jours. »
Asif Raza est un inspecteur adjoint, il confirme les faits :
« Les hommes sont maintenus en détention pour leur protection, car certaines personnes de la communauté musulmane veulent créer un problème religieux local. Une enquête est en cours sur les deux crimes répertoriés et il ne serait pas prudent pour ces hommes chrétiens de rester chez eux. S’ils tentent de le faire, ils seront tués par des membres en colère de la communauté. »
M.C.