Euthanasie, suicide assisté, Macron relance l’offensive [OPINION]

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« C’est le moment de le faire, alors nous le ferons ! » a promis Emmanuel Macron à Line Renaud (94 ans), marraine de l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD). On peut donc prédire l’issue de la « large consultation citoyenne » sur la fin de vie, préalable aux « évolutions de notre cadre légal d’ici à la fin de l’année 2023 » annoncées par le président de la République (cf. LSDJ 1686). Pour ces nouvelles « avancées », il dispose à présent de l’avis du Comité National Consultatif d’Ethique (CCNE) du 13 septembre (avis N° 139). Le CCNE estime « qu’il existe une voie pour une application éthique d’une aide active à mourir, à certaines conditions strictes avec lesquelles il apparait inacceptable de transiger ». C’est clairement un feu vert à l’euthanasie et au suicide assisté – les « conditions strictes » étant systématiquement transgressées dans un pays que le président tient pour un « modèle » s’agissant de la fin de vie, la Belgique (cf. LSDJ n°1556). Huit membres du CCNE sur quarante ont exprimé des réserves sur cet avis du CCNE … qui contredit un précédent avis du même CCNE émis en 2013 (avis N°121). Le Comité considérait alors comme essentielle la distinction opérée par la loi entre « laisser » et « faire mourir ». Il jugeait que le maintien de l’interdiction faite aux médecins de « provoquer délibérément la mort » protège les personnes en fin de vie, et qu’il serait dangereux pour la société que des médecins participent à « donner la mort ». Un tel revirement en moins d’une décennie interroge sur la solidité de « l’éthique » professée par le CCNE. Ne consiste-t-elle pas à « encadrer les dérives pour dériver avec le cadre », selon une formule du président de la Fondation Jérôme Lejeune, Jean-Marie Le Méné ?

Ce nouvel avis du CCNE a aussitôt été critiqué par neuf sociétés savantes et associations engagées dans les soins palliatifs. « Donner la mort n’est pas un soin »ont-elles rappelé dans un communiqué commun sur le site de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP.) Même mise en garde du côté de l’Ordre National des Médecins : « L’Ordre n’est pas favorable à l’euthanasie » a rappelé son président, François Arnault dans une interview au Quotidien du médecin (15 septembre). En cas de légalisation, il réclame « une clause de conscience, à l’instar de celle qui existe pour l’interruption volontaire de grossesse. » Il pointe enfin le retard de la France dans le déploiement des soins palliatifs. Pour Emmanuel Hirsch, philosophe et professeur d’éthique médicale, ce projet « dissimule le meurtre sous des arguments d’ordre médical » (Le Monde, 13 septembre).

Développer les soins palliatifs est aussi la priorité mise en avant par les représentants des cultes, tous hostiles à l’euthanasie. « Il n’y a nul besoin d’aller plus loin que la loi actuelle » (la loi Claeys-Leonetti NDLR) estime le grand Rabbin de France, Haïm Korsia. Il considère qu’une légalisation de l’euthanasie serait une « rupture anthropologique » frisant « l’eugénisme ». La Fédération protestante de France (FPF) craint qu’un changement de la législation soit dictée par des « motifs économiques ou idéologiques ». Quant au pape François, interrogé dans l’avion le ramenant du Kazakhstan, il a répondu : « Tuer, ce n’est pas humain. Point. Si tu tues avec des motivations [humanitaires], tu finiras par tuer de nouveau. Ce n’est pas humain. » « Comment comprendre que (…) la société ne verrait pas d’autre issue à l’épreuve de la fragilité ou de la fin de vie que l’aide active à mourir, qu’un suicide assisté ? » interrogent les évêques français, dans une tribune (Le Monde, du 13/09/2022).

Il s’agit d’ « une question politique, donc sociale autant qu’une question éthique et médicale » souligne Patrick Chastenet, professeur de sciences politiques à l’Université de Bordeaux, dans une tribune à La Croix (26/09/2022). Le choix de l’euthanasie, explique-t-il, est typique « des sociétés techniciennes voulant qu’au nom de la recherche de l’efficacité, chaque problème, y compris la mort, reçoive une solution technique » ...par-delà les vieilles notions de bien et de mal. « Cette façon de mourir ne deviendra-t-elle pas sinon une obligation légale, au moins une norme sociale ? » demande-t-il. En effet, dans une perspective utilitariste qui s’insinue dans l’opinion publique, « est-il bien raisonnable de vouloir souffrir et de causer dommage à la société en mobilisant inutilement des personnels hospitaliers et des médicaments coûteux, sans compter la perception d’une retraite ? ».
« Le droit de mourir bascule vite en devoir social », avertit Tugdual Derville, porte-parole de l’association Alliance Vita dans une tribune à Famille Chrétienne (en lien ci-dessous). Ajoutons que dans les circonstances actuelles, des « avancées » gouvernementales sur la fin de vie masqueraient opportunément un surplace sur les retraites, l’hôpital, les Ehpad, le pouvoir d’achat, l’école, la sécurité, l’immigration, la justice, la police...

Philippe Oswald 

Source : Famille Chrétienne

Cet article est publié à partir de La Sélection du Jour.


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