Des membres du Congrès américain dénoncent l’intolérance croissante envers les chrétiens au Royaume-Uni

Des membres du Congrès américains dénoncent l’intolérance croissante envers les chrétiens au Royaume-Uni

Amendes pour des prières silencieuses devant des cliniques d’avortement, prédicateur de rue condamné en première instance pour ne pas avoir utilisé le pronom revendiqué par une personne transgenre, le Royaume-Uni deviendrait-il un pays d’intolérance et d’hostilité envers les chrétiens ? Des élus américains dénoncent ce qu’ils considèrent comme une persécution croissante.

Il y a quatre siècles, des protestants influencés par le calvinisme quittèrent le Royaume-Uni après avoir été bannis de toutes les fonctions publiques en raison de leurs critiques de l’Église d’Angleterre. Ces puritains, premiers habitants européens de l’Amérique et connus sous le nom de Pères pèlerins sont entrés dans la mémoire des États-Unis qui se sont donnés, depuis le discours du président démocrate Franklin Roosevelt sur "les quatre libertés" pour mission de veiller sur le droit à choisir sa croyance à travers le monde. Dans ce discours de 1941, le président américain avait déclaré : "La deuxième est la liberté de chacun d'honorer Dieu comme il l'entend — partout dans le monde."

Qu’il s’agisse des élus, de la commission sur la liberté religieuse dans le monde (l’USCIRF) ou de l’ambassadeur itinérant des Etats-Unis pour la liberté religieuse dans le monde (un musulman depuis 2021, Rashad Hussain), Washington entend dénoncer les atteintes à la liberté de croyance et de culte.Dans cette veine, sept membres du Congrès ont cosigné, le 15 mars dernier, une lettre adressée à l’ambassadeur Hussain, rédigée par le représentant républicain du Texas Chip Roy, lui demandant de porter son attention sur l’aggravation du traitement des chrétiens au Royaume-Uni, le plus proche allié des États-Unis.

Des sanctions pour des prières silencieuses

La lettre mentionne le cas d’Adam Smith-Connor, un ancien militaire condamné à une amende de 100 livres pour avoir prié silencieusement devant une clinique d’avortement à Bornemouth, dans le sud de l’Angleterre. L’homme a déclaré qu’il regrettait d’avoir payé pour que son amie avorte, il y a 22 ans, et qu’il priait à cet endroit pour l’âme de son enfant. Un agent municipal lui a signalé qu’il enfreignait une ordonnance de protection des espaces publics (PSPO), un règlement qui crée une zone tampon de la taille d’un terrain de football autour des cliniques concernées et dans le périmètre desquels il est notamment interdit de prier.

Au moins cinq municipalités ont adopté des PSPO, indique les huit signataires de la lettre selon qui "le Royaume-Uni s’est engagé sur une voie inquiétante qui pourrait aboutir à des menaces existentielles pour la liberté d’expression, la liberté de religion et même la liberté de pensée."

Concernant cette dernière liberté, elle a été méconnue lorsque les agents se sont enquis de la raison pour laquelle Smith-Connor priait. En effet, ces ordonnances ciblent spécifiquement les prières anti-avortement et toutes les activités liées à ces convictions telles que les génuflexions ou le fait de faire un signe de croix.

Le 6 décembre dernier, Isabel Vaughan-Spruce, une catholique militante anti-avortement, a été interpellée par la police après avoir répondu aux agents qu’elle avait "peut-être prié" dans son for intérieur, alors qu’elle se trouvait dans la zone tampon autour d’une clinique d’avortement à Birmingham. Dans cette même ville du centre de l’Angleterre, un prêtre catholique, le père Sean Gough, avait lui aussi fait l’objet de poursuites. Les deux chrétiens ont obtenu gain de cause devant la justice le 16 février. À l’extérieur du tribunal, l’une des manifestants tenait une pancarte indiquant "Prier n’est pas un crime. HRA 1998".

La HRA (Human Rights Act ou loi sur les droits de l’homme) transpose dans le droit britannique la Convention européenne des droits de l’homme dont l’article 9 garantit la liberté de pensée, de conscience et de religion. Une liberté de plus en plus menacée selon des organisations comme Christian Concern ou l’Alliance Defending Freedom UK.

Ce qui inquiète les signataires de la lettre, c’est que ces mesures pourraient s’étendre dans deux nations du royaume. "Le Parlement examine un texte qui instaurerait ces zones de censure contre la liberté religieuse autour des centres d'avortement dans toute l'Angleterre et le Pays de Galles, et a récemment rejeté des amendements à cette législation qui auraient précisé que la prière silencieuse et les conversations consensuelles ne peuvent être considérées comme des délits", soulignent-ils, ajoutant que "l'arrestation d'individus pour une prière silencieuse est une attaque grossière, agressive et inutilement croissante contre les libertés fondamentales." 

Alors que le secrétaire aux Affaires étrangères Jeremy Hunt avait chargé Philip Mountstephen, évêque de Truro, d’étudier la persécution des chrétiens à travers le monde et d’établir un rapport avec des recommandations que le gouvernement a acceptées en juin 2019, le Royaume-Uni voit de nombreux cas de sanctions à l’encontre de croyants, particulièrement en matière de sexualité et de genre, observe Andrea Williams, directrice générale du Christian Legal Center (CLC) basé à Londres et lié à Christian Concern.

Selon elle, son organisation à but non lucratif créée en 2007 traite environ 1 000 cas chaque année de personnes en difficultés à cause de leur foi et reçoit presque quotidiennement des appels de parents en colère contre l’idéologisation de l’école.

Les questions de genre et la liberté religieuse

Parmi les clients du CLC, le docteur David Mackereth renvoyé par le département du Travail et des Retraites, à l’âge de 56 ans, parce qu’il n’avait pas utilisé le pronom voulu par son patient transgenre, mais celui relatif à son sexe biologique. La justice a estimé en 2019 que ses convictions religieuses ne respectaient la dignité humaine de son patient. Le témoigne du médecin sera examiné en appel les 28 et 29 mars prochains. Une enseignante a été licenciée pour la même raison et a perdu en justice, devant la Haute cour d’Angleterre et du Pays de Galles en octobre dernier.

"Si l’on m’avait été dit tout cela dans les années 1980, c’eût aurait été comme si quelqu’un m’avait parlé de Mars", affirme Williams, qui ajoute qu’un tel mode de pensée était étranger à la plupart des gens.

Cependant, relève Tim Wyatt, dans Premier Christianity, les sanctions concernant des chrétiens qui ont perdu leur emploi en raison de leurs opinions ou de l’expression de leur foi dans le cadre de leur travail sont le plus souvent rapidement annulées par les tribunaux.

Jean Sarpédon

Crédit image : Shutterstock/ Dave Colman

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