Mon mari a 36 ans quand tombe le verdict des médecins : Maladie de Charcot (SLA)

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J’ai eu la chance de naître dans une famille unie, heureuse et chrétienne. Je fais donc partie de ceux qui sont nés dans du coton !

Cela ne veut pas dire que tout était facile, mais j’ai quand même grandi dans un univers protégé et béni avec des parents justes et aimants. La foi ne m’a jamais quittée, mais je me rends compte aujourd’hui qu’elle représentait davantage un contrat ou un passeport pour une vie heureuse et sans accroche sur terre, qu’une assurance pour l’Éternité.

Un épisode dans mon enfance m’avait confortée dans cette foi un peu naïve et rassurante : mon petit frère s’était fait écraser par le tracteur de mon père avant ses trois ans. Mon père l’avait récupéré comme mort, aplati comme un crêpe. Mais il s’en était sorti miraculeusement et n’a gardé aucune séquelle.

J’imaginais ainsi que même s’il nous arrivait des tuiles, tout finissait par s’arranger... Je me suis donc mariée dans cette candeur avec Pierre et nous étions bien persuadés de mourir ensemble et d’être enterrés dans le même cercueil à plus de quatre-vingt-dix ans !

Nous nous sentions invulnérablesNous avons eu trois enfants et nous nous sentions invulnérables... Jusqu’à cet hiver 2012 où Pierre a commencé à se sentir très fatigué... J’étais enceinte de mon quatrième enfant et mon mari a tardé avant de m’alarmer, il voulait me protéger... Mais à la naissance de Simon, j’ai bien vu qu’il avait du mal à porter son fils.

Une menace avait toujours pesé sur lui, car sa mère et son grand père, puis son oncle avaient tous été atteints de la maladie de Charcot (SLA) vers l’âge de 35 ans. C’était l’âge de Pierre... Mais cette menace ne nous avait pas inquiétés, car nous nous sentions libres de cette hérédité. Les liens avaient été coupés spirituellement et pour nous, Pierre avait une nouvelle ADN en Jésus.

Il a fallu plusieurs mois avant que ne soit posé un diagnostic par un spécialiste de la Sclérose Latérale Amyothrophique (SLA) à Toulouse. Pierre refusait dans un premier temps de faire des examens car cette maladie était pour lui le comble de l’horreur. Il la connaissait si bien... Adolescents, c’est lui et ses soeurs qui avaient soigné leur mère.

La SLA est redoutable, elle fait fondre les muscles de tous les membres, elle touche aussi les muscles de la respiration et de la déglutition. Tout le corps lâche progressivement mais le cerveau fonctionne parfaitement.

Le jour où le doute ne fut plus permis, je me souviens à quel point Pierre fut effondré. En quelques secondes, le médecin nous annonçait sa fin proche dans des conditions terribles, et en même temps le risque pour nos enfants (une chance sur deux)...

Ce jour là, l’abîme s’ouvrait sous nos pieds, nous glissions vers un gouffre sans fond... C’est alors que je me suis ressaisie. J’ai senti, alors que tout était perdu et que notre avenir semblait lugubre, que  je pouvais, malgré tout, choisir la vie. J’ai brandi le psaume 23 comme un cri et je l’ai lu jusqu’au bout à Pierre, en serrant les dents pour ne pas pleurer.

« Quand je marche dans la vallée de l’ombre de la mort, je ne crains aucun mal car tu es avec moi « ...

Cette lecture a été pour moi la cristallisation d’un choix, je crois qu’on peut toujours choisir... Mais il ne faut pas trop tarder, il faut attraper cette main qui nous est tendue.

Peu à peu la paix m’a envahiePeu à peu la paix m’a envahie, ce n’était pas du déni, ni du refoulement, non c’était la paix qui surpasse tout entendement. Elle m’a permis de supporter les deux années redoutables qui suivirent. L’affaiblissement rapide de Pierre, qui très vite a eu besoin d’aide pour manger, s’habiller, se laver... Sans parler des enfants et leurs questions (l’aîné avait dix ans, le dernier quelques mois).

Au bout de plusieurs mois, Pierre ne pouvait plus du tout bouger, il mangeait difficilement, il respirait avec un masque...

Tous ces temps furent bénis malgré tout, nous arrivions à rire dans des situations dramatiques et je me sentais envahie souvent par une joie indescriptible. Elle venait forcément d’ailleurs, vu les circonstances...

Nous avons cru à un miracle de guérison jusqu’au bout mais Pierre s’est éteint paisiblement en août 2014Nous avons cru à un miracle de guérison jusqu’au bout mais Pierre s’est éteint paisiblement en août 2014. Cette mort, sur le coup a été pour moi comme une double peine. La tristesse de voir partir celui qu’on aime et le sentiment d’avoir été trahie par cette force qui m’avait soutenue durant ces deux longues années. Pourtant au milieu de mes larmes, j’ai perçu comme un clin d’oeil divin : le mois de la mort de Pierre, des milliers de gens sur la planète relevaient le défi des Ice-Bucket challenge, se versant un seau d’eau sur la tête dans le but de récolter des dons pour soutenir la recherche contre la SLA.

Aujourd’hui, je sens bien que Dieu ne m’a pas quittée. La paix est toujours là et la joie me submerge régulièrement sans aucune raison apparente. Ce sont des cadeaux qui m’éblouissent et me remplissent de reconnaissance !

Propos recueillis par S.G.


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