Le projet sur la fin de vie présenté au Conseil des ministres

Le projet sur la fin de vie présenté au Conseil des ministres

Un projet de loi sur la fin de vie, voulu par le président français Emmanuel Macron, a été présenté mercredi en Conseil des ministres. Ouvrant la possibilité, strictement encadrée, d'un suicide assisté, il est jugé trop tiède par certains, dangereux par d'autres.

Il s'agit d'"une réponse éthique aux besoins d'accompagnement des malades", a plaidé la ministre de la Santé Catherine Vautrin, à la sortie du Conseil.

Ce texte, "relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie", constitue la grande réforme sociétale du second quinquennat d'Emmanuel Macron, réélu en 2022, qui s'était engagé de longue date à changer la législation en la matière.

Mais l'exécutif prend le risque de réveiller de forts clivages éthiques et religieux sur le bien-fondé de la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté.

Le chef de l'Etat, qui a présenté les grandes lignes de ce projet en mars, se refuse à employer ces deux termes, préférant celui d'"aide à mourir". Toutefois, il s'agit bien de proposer à certains patients le moyen de suicider et, quand ils sont incapables d'accomplir le geste fatal, de le faire pour eux.

Les conditions seront très strictes, selon une version consultée par l'AFP avant le passage du texte fin mars devant le Conseil d'Etat, le juge administratif suprême qui assume aussi un rôle de conseiller juridique pour le gouverment et le Parlement.

Selon cette version, qui pourrait avoir évolué depuis, l'aide à mourir sera réservée aux patients majeurs, nés en France ou résidant de longue date dans le pays, en mesure d'exprimer clairement leur volonté et victimes de souffrances physiques ou psychologiques intolérables et impossibles à traiter.

Enfin, le pronostic vital devra être engagé à court ou moyen terme, une formulation qui laisse de fait une grande marge d'appréciation aux soignants.

Une fois qu'un patient demandera une aide au suicide, ce sera à un médecin de se prononcer après une procédure lui laissant jusqu'à 15 jours. Il le fera seul, mais forcément après avoir consulté d'autres soignants.

L'Eglise de France farouchement opposé au texte

Pour le président Macron, ces conditions permettent un "équilibre" en créant un "modèle français" de la fin de vie. Mais ce juste milieu revendiqué ne satisfait pleinement ni les adversaires ni les partisans de la légalisation de l'aide au suicide ou de l'euthanasie.

Les premiers expriment un vif rejet de ce qu'ils voient comme une dérive majeure.

Vent debout contre le texte, l'Eglise de France vient ainsi de se doter d’un porte-parolat dédié de quatre évêques.

Les opposants comptent aussi de nombreux soignants, notamment dans les soins palliatifs, selon lesquels il faudrait d'abord se préoccuper du développement de ces soins, encore peu disponibles en France, pour s'assurer que des patients ne réclament pas de mourir faute de trouver une prise en charge adaptée à leurs derniers jours.

Le sujet figurera en partie dans le projet de loi et, parallèlement, une "stratégie décennale" des soins palliatifs doit être présentée en Conseil des ministres, augmentant peu à peu les dépenses publiques dans ce domaine pour atteindre 2,7 milliards d'euros annuels en 2034 - contre 1,6 milliard actuellement.

Selon une étude de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap) parue mercredi dans le quotidien chrétien La Croix, 80% des professionnels adhérents "refuseraient de prescrire, fournir, préparer et/ou administrer un produit létal (plus de 60% chez les non-adhérents)".

Le gouvernement fait valoir que le texte de loi prévoit une clause de conscience, comme pour les interruptions volontaires de grossesse, que le médecin peut faire jouer.

Les partisans de l'aide à mourir sont, eux, insatisfaits, mais moins virulents. S'ils regrettent des conditions trop restrictives, ils se montrent soulagés de voir arriver un texte qu'ils craignaient de voir enterré.

L'exécutif a en effet pris le temps pour élaborer ce projet : une année, marquée par de multiples reports.

Les députés vont entamer fin mai l'examen du texte dans l'hémicycle, début d'un long trajet parlementaire qui pourrait prendre jusqu'à deux ans avant l'adoption d'une loi en bonne et due forme.

La Rédaction (avec AFP)

Crédit image : Shutterstock / BlurryMe

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